Lettre ouverte
d'un homme de droite à un homme de gauche
Il n’est pas si fréquent que deux individus appartenant aux extrêmes opposés aient la possibilité d’échanger calmement leur point de vue sur leur perception du monde. Alors quand l’occasion se présente, il faut la saisir, ce que j’ai fait.
À l’occasion d’un échange épistolaire avec un homme, il s’est avéré que celui-ci était très très à gauche, quand moi je considère être très très à droite. Avant de nous rencontrer, il a donc absolument tenu à déterminer si j’étais « safe », et donc à en savoir plus sur ma vision du monde – me posant tout un tas de questions pour savoir, entre autres, ce que je pense du colonialisme, du racisme,... s’il m’était possible de voter à l’extrême-droite (jusqu’ici, j’étais resté évasif) –, et me signifiant surtout que, si elle ne lui correspondait pas, notre échange s’arrêterait là.
Alors par souci de clarté et de franchise, je lui ai préparé ce texte, en prenant soin de l’avertir que j’y allais « carrément », et que même si certaines phrases se rapportaient directement à lui, en lui prêtant des idées qui ne sont pas forcément les siennes, il ne fallait pas les prendre trop personnellement, que cela s’inscrira simplement dans le flux de cette prose et du ton adopté.
Et comme j’en suis assez content et que je le trouve plutôt abouti malgré des lacunes et des approximations inévitables ; je me suis dit qu’il pourrait être intéressant de le partager afin que d’autres puissent le lire aussi ; et par là découvrir l’aperçu d’une vision du monde dont j’ai la prétention de croire qu’elle n’est pas trop banale. Je rappelle qu’un aperçu est nécessairement partiel, mais le texte se suffit à lui-même.
Attachez vos ceintures. On démarre.
Les bêtes
Nous vivons dans un monde où la maman cigogne qui sent que la nourriture risque de manquer pousse son petit le plus faible du haut du toit pour qu’il s’écrase au sol.
Nous vivons dans un monde où les dauphins qui nous charment par leur élégance sont en réalité des violeurs en puissance.
Nous vivons dans un monde où un parasite peut prendre possession du système nerveux d’un insecte pour le commander comme un zombie.
Nous vivons dans un monde où les lions festoient de leur proie fraîchement chassée, un vieux buffle ou une jeune antilope encore maladroite, parfois avant même de l’avoir mise à mort, c’est-à-dire qu’elle respire encore pendant qu’elle se fait arracher des quartiers de viande.
Et les hommes
Et dans ce monde il y a l’homme. L’homme aussi est cruel, vil, méprisable, affreux.
Et pourtant l’homme a un immense pouvoir : c’est qu’il a conscience de lui-même.
Partant de là il peut s’extraire des schémas primaires qui régissent le comportement d’un être purement bestial et s’affranchir de la violence irraisonnée vers laquelle il tend naturellement. Et c’est ainsi que l’homme fort qui a faim, plutôt que de tuer celui qui a le pain, peut le lui échanger contre une pièce. C’est ainsi qu’il peut édifier des sociétés avec des règles, des lois, des codes qui imprègneront les comportements des individus pour qu’ils puissent interagir et fonctionner ensemble avec le moins de heurts possible.
Il y a eu des guerres et des guerres, il y a eu de la souffrance et des morts par milliers. Il y a eu Tamerlan et ses pyramides de crânes, il y a eu les Empires Chinois qui se sont entredéchirés avec des morts par centaines de milliers, il y a eu les aztèques et leurs sacrifices par centaines, il y a eu tant de conflits, de massacres et de guerres qu’aucun historien, même s’il y passait toute sa vie, ne saurait les retenir tous.
Il y a eu des esclaves sur tous les continents, vendus par leurs frères à des étrangers, sacrifiés à des dieux dont on ne parle plus ; en Chine sous la dynastique Qin ou au Maghreb et Moyen-Orient chez les arabes, on les châtrait pour éviter qu’une progéniture ne vienne se venger. L’Egypte, Carthage, Rome, Tunis, Babylone, Tenochtitlan, Gao et Tombouctou ; tous les peuples, de toutes les civilisations, sur tous les continents, ont un jour réduit leurs frères de race en esclavage – même les amérindiens – Creeks, Pawnees, et autres – très loin de l’image romantique de doux chamanes qu’on peut en avoir, s’y sont illustrés bien avant l’arrivée des colons.
Je n’omets pas, bien sûr, le commerce triangulaire ; je t’informe, par ailleurs, que même les blancs y étaient soumis, puisque les colons les moins fortunés – Irlandais, Polonais, Italiens et autres –, pour rembourser la traversée de l’Atlantique souvent faite dans des conditions si insalubres que beaucoup en mourraient, payaient alors leur dette en mois et en années de leur vie.
Tant bien que mal, on évolue
Vois-tu toutes ces horreurs qui te font détester l’humanité, la vomir et pleurer d’en faire partie ?
Mais ce serait omettre une chose fondamentale dans l’équation. Toutes ces choses… appartiennent au passé. Elles n’existent plus. Il n’y a plus de commerce triangulaire. C’est fini les africains vendus par les chefs de tribus à des marchands arabes qui les passent ensuite aux européens ; c’est fini les guerres de conquêtes où on brûle des villes entières juste pour faire comprendre qui c’est le patron ; c’est fini de se demander si certains hommes sont bien des hommes et pas des objets ou des singes et d’envoyer les sodomites ou les juifs au bûcher comme un avant-goût de l’Enfer auquel on les croit promis.
Du moins… pas partout. Mais dans certains pays, ça l’est. En France ça l’est.
En France un homosexuel peut vivre et se marier.
En France les femmes sont, quoi qu’on en dise, déjà traitées en égales des hommes. Françoise Giroud disait : « La femme serait vraiment l'égale de l'homme le jour où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente. » Ça y est, Madame Giroud, on y est, on a des femmes ministres ET incompétentes.
En France, aussi, on a eu des héros noirs (Eugene Bullard) dans l’aviation lorsqu’aux USA ils discutaient encore pour savoir s’il fallait partager les mêmes salles de classes ou non. Dès le XVIIIe siècle, nous avons eu un député noir : Jean-Baptiste Belley. Puis il y a eu Blaise Diagne en 1914. Alors non, nous n’avons pas de leçon à recevoir, ni des américains ni de personne.
En 1848, le Français Victor Schœlcher est l’homme par qui l’abolition définitive de l’esclavage a pu avoir lieu, entérinant la fin d’une réflexion commencée avec la Controverse de Valladolid en 1550. Vue avec nos yeux modernes, cette controverse peut paraître aberrante ; mais si elle a permis d’en arriver là, est-ce que ça ne valait pas le coup, en fin de compte ? Ce questionnement moral était déjà l’indicateur d’une remise en question qui dès lors ne pouvait que se poursuivre.
À titre de comparaison, la Chine ne mettra fin « définitive » à l’esclavage que vers 1950. En fait…, on y compterait encore, de nos jours, jusqu’à 3 millions d’esclaves sans compter un peuple tout entier asservi à une dictature numérique qui inspire grandement nos gouvernants actuels.
Tu sais sans doute pertinemment que les Émirats arabes unis et le Qatar construisent leur pays avec des ouvriers étrangers, en grande proportion asiatiques, souvent retenus captifs et privés de leur passeport, contraints de travailler dans des conditions effroyables et de subir les pires vices, pouvant aller jusqu'à la prostitution forcée.
Les Africains noirs détestent les arabes parce qu’ils savent à quel point ceux-ci se croient toujours supérieurs à eux et qu’ils continuent ENCORE de réduire les expatriés noirs en esclavage –entre autres, à travers le dévoiement du kafala au Liban, en Algérie, au Maroc...
Un homosexuel, dans ces pays-là, ne fait pas de vieux os. Il plonge du haut d’un toit ou est ébouillanté avec de l’huile de friture.
Mein Kampf est un best-seller… en Allemagne ? En Pologne ? Non. En Turquie. Au Maroc. En Palestine. Antisémitisme et homophobie ataviques.
La diversité
Je n’aime pas la diversité promue par la gauche, qui veut tous nous mélanger, mais surtout les blancs, pour qu’on disparaisse, parce que soi-disant on serait des monstres patriarcaux, alors que, comme on l’a vu, toute l’humanité s’est illustrée dans l’horreur.
Je n’aime pas cette idéologie qui promeut la diversité mais nie nos différences, qui veut en réalité qu’on soit tous les mêmes, qui a l’arrogance de vouloir faire que tout le monde s’entende avec tout le monde, sans comprendre que pour cela il faudrait nous transformer en clones les uns des autres ; qui veut que toutes les portes soient toujours ouvertes et par conséquent que personne ne puisse se sentir véritablement chez lui nulle part.
Je n’aime pas cette idéologie qui refuse de comprendre qu’il en va des peuples comme des individus, que nous avons tous nos différences et que certains ne s’entendront jamais entre eux. Il y a des gens qui donnent plus qu’ils ne prennent, d’autres qui prennent plus qu’ils ne donnent. Pendant que certains peuples ont appris à piller, d’autres ont appris à bâtir et d’autres encore sont capables des deux. Mais pour ça, il faut avoir un aperçu de l’histoire dans toute sa complexité et il faut s’y être un minimum intéressé.
Je n’aime pas cette idéologie hypocrite qui se prétend tolérante mais refuse pourtant d’entendre ou même de voir ce qui ne va pas dans son sens. Cela génère des gens qui ont peur de se confronter à la réalité, à sa complexité, à sa richesse inouïe qui donne le vertige.
La preuve : avant même que de me rencontrer pour une promenade – soit la forme d’entrevue la plus inoffensive qui soit – tu veux savoir si je suis… safe.
Spoiler, des fois que tu ne l’aurais pas compris : je ne le suis pas. Mais alors pas du tout.
Vois-tu, j’aime la diversité humaine : la vraie.
J’aime voir la frivolité poétique des Italiens, le solennel des Andalous, la mélancolie douce des Tyroliens ; j’aime entendre le chant rauque des Mongols, l’accent roucoulant des Suédois et l’opéra des grands compositeurs Allemands, Italiens et Français ; j’aime savoir qu’il existe encore des berbères tout vêtus de bleu qui traversent le désert à dos de chameau ou de dromadaire (on continue de confondre l’un et l’autre), des Maasaï en tunique rouge qui s’amusent à rebondir en cercle sur la terre battue ; même si je ne les verrai jamais. J’aime savoir qu’au Japon on allume encore des bougies dans les temples, qu’à Mexico on acclame les catcheurs comme des héros et qu’en Suisse des bergers montent encore chaque année dans les alpages en chantant le Yodel.
J’aime que dans tous les pays, on honore les morts, chacun à sa manière et selon ses coutumes. J’aime entendre les rabbins disserter sur la Torah et nous apprendre à vivre en sainteté, j’aime entendre les chants chrétiens et surtout le Agni Parthene dont la grâce me fait frissonner et qui est miraculeusement beau dans toutes les langues, j’aime savoir qu’il y a des bouddhistes en toges oranges qui méditent dans l’espoir d’atteindre le nirvana, j’aime savoir que les derviches continuent de tourner pour recevoir la grâce divine d’une main et la transmettre de l’autre.
Dans mon pays, la France, j’aime entendre le tocsin des églises dans les villages, les cloches des vaches dans les Alpes et voir l’embrasement de la cité chaque année à Carcassonne. J’aime notre langue précise comme un mécanisme d’horloge et avec laquelle on peut danser et chanter en restant assis et muet.
Mon pays, je lui aime toutes sortes de choses qui me touchent, qui ne seront pas exactement les mêmes qu'à d'autres, car chacun a sa sensibilité propre qui lui fait voir ce qui a d'autres reste invisible.
J’émets des généralités sur les peuples tout en sachant distinguer l’individu du groupe auquel il appartient. Je ne juge pas un homme selon sa couleur de peau mais je ne refuse pas de la voir car elle dit son histoire tout autant que son maintien, sa mise et ses paroles. J’aime la diversité ; et cette diversité implique qu’il est des populations qui sont fondamentalement incompatibles entre elles parce qu’il en va des peuples comme il en va des individus que chacun a ses défauts et ses qualités et que tous les mariages ne sont pas bons à faire.
Être raciste, selon la gauche, c'est précisément reconnaître qu'il y a une diversité, que cette diversité engendre des différences et que ces différences engendrent des incompatibilités qui engendrent des problèmes.
On ne fait pas entrer des Pakistanais issus d’un pays où l’on marie de force des petites filles à des hommes matures et où l’on sort manifester par milliers pour une caricature dans le pays de Brigitte Bardot, des Folies Bergères et de Charlie Hebdo en s’attendant à ce que tout se passe bien.
On ne fait pas entrer un Camerounais qui se vante avec fierté d’avoir mangé du zèbre et du chimpanzé, et qu’il n’hésiterait pas à découper son fils à la machette si celui-ci s’avérait être pédé, dans le pays d’Aymeric Caron, de la Cage aux Folles en s’attendant à ce que tout se passe bien.
On ne fait pas entrer des Algériens qui n’ont que la vengeance dans la tête et ont été bercés par le Kassaman, leur hymne national – seul hymne au monde qui nomme son ennemi ; 60 ans plus tard, les algériens continuent de chanter « Ô France ! voici venu le jour où il te faut rendre des comptes » et les enfants grandissent avec cet air, donc cette haine sans cesse réactualisée, dans la tête –, dans le pays du « Temps béni des colonies » en s’attendant à ce que tout se passe bien. (Au fait, tu cautionnes la vengeance, dans ce cas présent ?)
On ne fait pas entrer des Turques qui hurlent à la mort quand on leur parle du génocide arménien et qui rêvent du grand empire ottoman dans le pays d’Aznavour en s’attendant à ce que tout se passe bien. (Ecoute la chanson : « Ils sont tombés »)
On ne fait pas entrer des musulmans en France, « fille aînée de l'Église » en s’attendant à ce que les cathédrales et les églises ne brûlent pas.
On ne fait pas entrer des hommes par centaines de milliers, issus des pays avec les cultures les plus rétrogrades de notre époque et du monde tout entier en s'attendant à ce que nos droits puissent continuer de progresser et que nos conditions de vie ne se dégradent pas, puisque nous devons alors redéployer une large partie de notre énergie (énergie humaine, matérielle et financière) à les gérer ; une des raisons pour lesquelles, d'ailleurs, nous avons laissé l'Algérie à son indépendance puisqu'elle engloutissait jusqu'à 20% du budget de la France. Si la France a eut un tort, en Algérie, bien plus que les enfumades du Général Bugeaud, c'est d'avoir sorti son propre ennemi de la glaise – comme un monstrueux Golem – en permettant sa coalition et en lui donnant des infrastructures, des routes, des écoles, des casernes, des gares, des hôpitaux et j'en passe... Toutes sortes de choses que le FLN n'a pas su entretenir convenablement ; préférant s'efforcer de détourner la frustration des algériens vers la France quand ceux-ci auraient toutes les raisons de s'en inspirer en appliquant à leurs vieux révolutionnaires engraissés et impotents du FLN le même sort qu'à un Robespierre après la Terreur.
Nous méritons de vivre en paix sur la terre de nos ancêtres.
NOUS SOMMES les indigènes sur cette terre.
Après la 1ère Guerre Mondiale, nos arrières grands-parents s’étaient jurés, oui jurés, que c’était « la der’ des ders », qu’il n’y en aurait plus jamais d’aussi effroyables ; ils y croyaient fort. Les pauvres… (À ce titre le film « La vie et rien d’autre » de Bertrand Tavernier, est un chef d’œuvre qui montre ce qui reste une fois qu’a cessé la complainte des canons et qu’il faut compter les morts.)
Ta terre mérite d’être aimée et respectée. Ta terre, que tu le veuilles ou non, s’appelle la France. C’est elle qui te nourrit. Elle n’est pas parfaite et son peuple ne l’est pas non plus. Mais croire que les autres peuples le sont plus que nous ; là est le véritable racisme décomplexé de la gauche.
Un extrême en appelle un autre
Notre époque a ceci de pratique, qu'avec la mise en exergue de nos folies au moyen des réseaux sociaux, elle nous permet certes de nous y perdre plus facilement mais par réaction mécanique de nous en détourner tout aussi vite pour revenir à des principes plus naturels, universels et vertueux.
C'est ainsi, par exemple, pour ne prendre que ce sujet, qu'à l'extrême consumérisme des 30 glorieuses, qui a entraîné des abus terrifiants, succèdent les écolos-vegans, non moins extrêmes à leur manière (il suffit de voir les allocutions frénétiques de certains d'entre eux pour s'en convaincre). Mais ces écolos-vegans ne s'aperçoivent pas que si on cessait du jour au lendemain de manger de la viande, leur victoire ferait d'eux les bourreaux de leurs petits protégés puisque tout l'écosystème en serait bouleversé et qu'il faudrait trucider ce bétail dont on n'aurait plus l'usage. Les problèmes seraient infinis et cet article ne vise pas à en faire l'inventaire.
Et à ces écolos-vegans si moralisateurs, si pénibles, si imbus de leur propres certitudes, succèdent des bons gros viandards qui vantent les méritent de la bonne barbaque du terroir, avec du bétail élevé à la campagne et au bon air. Seulement ces bons gros viandards ne s'aperçoivent pas que si tout le monde bouffait comme eux, on aurait très vite intérêt à bâtir des gratte-ciels de 6 kilomètres de haut comme dans les Monades Urbaines, parce qu'il en faudrait des hectares de verts pâturages pour nourrir tout le monde comme ça.
Un jour peut-être, le juste milieu...
Malgré tout
Et malgré tout, malgré ce portrait peu flatteur de la vie, de l’humanité et de l’existence même, malgré les guerres, les massacres et les pillages ; il y a deux choses que les hommes veulent par-dessus tout, et petit à petit, tout nous y conduit.
La beauté et l’amour.
Pour le voir, il faut regarder plus en détail. Parce que si la douleur nous retient comme les dents d’une scie, la beauté et l'amour sont douces comme du coton, si bien qu’il est aisé de n’y faire pas attention. Alors il faut faire un effort. Voir qu’elles existent par mille et une petites choses discrètes.
Par cette mère qui donne le sein à son nourrisson.
Par cette peinture d’un champ de coquelicots.
Par ce rire d’un enfant encore insouciant.
Par ce vieil homme qui entretient le verger duquel il tirera sa nourriture.
Par l’odeur du pain chaud chez le boulanger.
Ou celle du café, le matin après s’être réveillé.
Par ce père qui apprend à son fils ce qu’il sait.
Par les aphorismes des sages dans les livres.
Par ce pont de vieilles pierres qui en a vu tant passer.
Par cette modeste chapelle dans laquelle j’aime à prier.
Par le bruit du vent dans les feuilles des arbres.
Et même celui de la pluie contre ma fenêtre.
Par toi, qui a si peur d’être blessé et de blesser toi-même.
Et les fleurs continuent d’étendre leurs corolles.
Et les abeilles de butiner et de récolter le pollen.
Et les arbres de pousser en nous donnant leur oxygène.
Et les nuages dans le ciel leur course folle.
La mort et la vie font partie du cycle.
Et pendant ce temps, la mante religieuse continue de couper la tête du mâle après l’accouplement.
Le coucou continue de pousser les œufs du nid pour y laisser le sien.
Le bébé requin continue de manger ses frères et ses sœurs dans le ventre de sa mère.
Et les fourmis redoublent de génie pour s’annihiler entre colonies. Les petites, pour venir à bout des plus grosses, les attrapent par les pattes et les écartèlent avant que la guerrière ne vienne avec ses mandibules pour les achever en leur tranchant la tête.
La Nature est fasciste puisque le faible est écrasé au profit du fort ; et même quand l’espèce est matriarcale, elle n’est pas pour autant meilleure ; et ce ne sont pas les mâles hyènes, s’ils pouvaient parler, ou les Latrodectus hesperus, qui diraient le contraire.
Finalement, tu vois, l’homme n’est pas plus terrible que le règne animal duquel il est issu.
S’il n’y aurait plus l’homme, il y aurait certainement les fourmis.
Voter extrême-droite
Tu me demandes avec insistance si je pourrais voter pour l’extrême-droite, comme si c’était quelque chose d’essentiel ; je ne répondrai pas à cette question parce qu’elle est dérisoire.
Le discours de Marine Le Pen est plus doux que celui de Georges Marchais à son époque – pourtant communiste – y compris sur l’immigration.
Nous n’avons pas d’extrême-droite. La véritable extrême-droite, aujourd’hui, c’est celle d’Henry de Lesquen, de Rivarol, de Yvan Benedetti ; et eux ne sont rien et c’est parfait comme ça.
Je ne suis d’extrême-droite que selon ta grille de lecture, qui est toute récente dans l’histoire. Parce que si on s’en réfère à ta vision du monde, alors 99% de l’histoire de l’humanité, sur tous les continents et depuis l’aube des temps, fut d’extrême-droite.
Tu comprendras donc aisément que c’est insensé.
Cette vision binaire du monde ne permet pas sa juste compréhension.
Et moi, malgré tout ce texte que je viens de t’écrire, je ne fais que l’effleurer.
Parce que – comme chantait Gabin :
« Maintenant je sais, je sais qu'on ne sait jamais
La vie, l'amour, l'argent, les amis et les roses
C'est tout ce que j'sais
Mais ça, j'le sais »
You are not prepared
Ainsi tu veux sélectionner tes fréquentations selon qui est « safe » ou pas, en fonction d’une grille de lecture bien déterminée. Quelle arrogance ! quelle étroitesse d’esprit !
Mais, mon pauvre ami, la vie toute entière n’est pas « safe ». Chaque seconde qui passe où tu es en vie est un petit miracle. Ton corps lutte en permanence contre un milliard d’agressions dont tu n’as même pas idée. Tu n’es pas safe pour toi-même puisque tu contiens dans ton corps des bactéries qui sont prêtes à t’annihiler dès l’instant où tu cesses de te donner les ressources nécessaires pour survivre. La machine peut s’arrêter à tout instant pour n’importe quel motif, car de la même manière que nous sommes vivants nous avons tous en nous les germes de la mort.
Le problème, c’est qu’à force d’éviter les contradicteurs qui sont « pas safes » et disent des choses qui ne font pas plaisir à entendre, à force de les « cancel », de nier la réalité et tout ce qu’elle implique de complexité, vous nous précipitez tous dans l’abîme ; vous nous précipitez vers quelque chose qui ne sera plus ni de droite ni de gauche mais qui sera à coup sûr très autoritaire.
La réalité est ainsi faite qu’elle s’impose avec violence à ceux qui ne veulent pas la voir. Mais ce n’est pas grave. Parce que dans les ténèbres l’auréole des anges brillera et leurs ailes se déploieront pour nous éviter la chute.